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LITTERATURE CONGOLAISE : IN MEMORIAM. 4 juillet 2009 – 4 juillet 2014 : 5è anniversaire de la mort de TATI LOUTARD

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Congo, (Starducongo.com) - Le 4 juillet 2009, l’écrivain Jean Baptiste tirait sa révérence à Paris des suites d’une maladie. Cinq après, un hommage lui a été rendu le 21 juin 2014 à la Maison de l’Afrique de Paris au cours duquel a été célébrée son œuvre poétique et narrative. Ci-après la communication intitulée « L’AMOUR DU PAYS NATAL DANS LA POESIE DE TATI LOUTARD» faite par Noël Kodia-Ramata, son ancien étudiant à l’Université Marien Ngouabi de Brazzaville, son fils spirituel.
LITTERATURE CONGOLAISE : IN MEMORIAM. 4 juillet 2009 – 4 juillet 2014 : 5è anniversaire de la mort de TATI LOUTARD
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Parmi les trois grands poètes de la première génération des écrivains congolais : Tchicaya U Tam’Si, Jean Baptiste Tati Loutard et Maxime Ndébéka, l’auteur des « Poèmes de la mer » et des « Racines congolaises » a été le seul qui a affronté les vicissitudes de la société congolaise en restant plus près de ses parents au pays. Tchicaya U Tam’Si a passé presque toute sa vie hors du pays. Maxime Ndébéka vit actuellement en France plus d’une décennie. En passant plus de temps au Congo qu’à l’étranger, Tati Loutard se définit comme l’enfant du terroir. Et cela se remarque dans son œuvre poétique où il exprime son amour pour son pays natal.

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Les artistes ont toujours chanté le pays natal. Aussi le sentiment d’appartenir à un pays fait partie de la vie d’un homme, à plus forte raison un poète. Dans les textes poétiques de Tati Loutard, tout ce qui est lié à son natal occupe une place considérable. Aussi, la première racine qui s’implante dans le cœur du poète est la mer, l’océan, cette mère protectrice de Ngoyo son terroir. Ngoyo qui l’a vu naître, Ngoyo où il a été enterré, Ngoyo son village natal situé a quelques kilomètres de la ville de Pointe Noire.

L’amour du pays chez Tati Loutard se révèle presque dans toute sa poésie. Pour notre communication, nous nous sommes fondés principalement sur ses premiers textes comme « Poèmes de la mer », « Racines congolaises », « L’Envers du soleil », « Les Normes du temps », pour ne citer que ceux-là, où son amour pour son natal est manifeste.

Son premier recueil « Poèmes de la mer », est un livre dans lequel son enfance se reflète sur les vagues de l’océan. Ici, on peut découvrir dans le poème intitulé « Nouvelles de ma mère » l’enfance du poète au carrefour de l’amour maternel et l’amour de Ngoyo le village de ses parents. Dans « Poèmes de la mer », c’est le natal maritime qui explose dans l’inspiration du poète et qui fait encore penser à son enfance.

L’amour du pays qui constitue la source de son inspiration, ne tarit pas et continue son chemin dans les autres textes. Avec « Racines congolaises », c’est le retour physique au pays après quelques années passées à l’étranger. Et ce retour au Congo est un pari que le poète a gagné sur lu même. Sur les 35 textes qui constituent le recueil, en dehors des aphorismes de la vie poétique qui accompagnent souvent la majorité de ses recueils, 10 poèmes sont consacrés à son retour. Un poème en guise de lettre dédiée à son « grand-frère » Tchicaya U Tam’Si vivant encore en France, décrit l’accueil que le pays lui a réservé. Une évocation de la chaleur qu’il retrouve dans son Congo natal. On peut lire :

« Je suis revenu par une lune maigre; / Ceux qui m’attendaient par la porte d’un nuage, / Tenaient – tout allumés – les torches de leurs dents. / Ce fut pour moi une plus vive lumière que les étoiles / Qui croisèrent longtemps une vue dans le ciel de France ».

Et ce sentiment de retrouver le natal de ses ancêtres l’éloigne de plus en plus de cette ambiance hermétiquement fermée qu’il a connue en Occident ; et c’est ce qu’il exprime à son ami René-Claude Lachal dans un poème intitulé « L’Europe infernale » :

« C’est impossible, vivre dans un bassin de silence / Au confluent bleu du jour et de la nuit perpétuelle / Quand le soleil se repose et que la lune s’intimide / Au milieu des cendres du ciel / Et que la Ténèbre ne s’est point levée qui / Pour lui donner cet éclat de diamant qui me distrait ».

Tati-Loutard aime tellement son pays que vivre loin de ses parents s’avère parfois pénible et cela devient même impensable pour lui. Aussi, ce sentiment sera exprimé de nouveau avec force quelques années plus tard dans son quatrième recueil, « Les Normes du temps » dan la lettre qu’il adresse à une fille de New York :

« Je t’écris de loin, depuis les bords du Congo / Devant l’Ile Mbamou ; c’est une motte verte / Qui s’est refugiée au milieu des eaux / Pour éviter de tourner avec la terre. / (…) / Je te plains toi, là bas dans le désert / De béton et d’acier / Avec les plus beaux rêves des hommes, / Dans les havresacs des bandits. / Tu dois avoir peur dans les quartiers perdus / Quand la lune n’est plus au sommet de la nuit. »

Mais l’amour du natal, dans l’innocence de son enfance, se manifeste dans « Baobab », texte emblématique dans lequel Tati Loutard retrouve le village de ses ancêtres. Cet arbre séculaire qui jouxte aujourd’hui sa tombe. Déjà de son vivant, le poète interpellait cet arbre. Ce baobab qui symbolisait ses racines congolaises :

« Baobab ! Je suis venu replanter mon être près de toi / Et mêler mes racines à tes racines d’ancêtres, / Je me donne en rêve tes bras noueux / Et je raffermis quand ton sang fort / Passe dans mon sang ».

Un rêve prémonitoire quand on sait que le poète aura pour dernier demeure le cimetière familial de Ngoyo où se lève, avec majesté, ce grand arbre à qui le poète s’adressait de son vivant.

Dans presque toute sa poésie qui fait allusion à son retour au Congo, Tati Loutard confirme son amour pour son pays où les astres tels le soleil, les étoiles, la végétation, les oiseaux et l’eau font partie intégrante de son terroir Ngoyo. Tous ces éléments sont révélés dans « Racines congolaises ». On peut découvrir :

- Le soleil :
« Soleil de midi / Etrange calvitie / Gagnant toute pousse d’azur »

- Les étoiles :
« Je n’ose plus regarder les étoiles / Dans mes yeux, elles font l’effet du citron »

- La végétation :
« Baobab ! Je suis venu planter mon être près de toi / Et mêler mes racines à tes racines d’ancêtre »

- Les oiseaux :
« L’arbre n’avait comme feuillage / Que des ailes d’oiseau »

- L’eau :
« Les femmes vont parmi les rayons / Portant à la ville leur récolte de poisson / Le Congo passe portant à la mer / Sa fraîche moisson d’herbe et d’eau douce »

On retrouve aussi le pays natal dans « L’envers du soleil » à travers le poème « L’appel à ma mère » qui apparait comme une réponse au texte « Nouvelle de ma mère » des « Racines congolaises ». Ici, le pays vit dans le bruit de la végétation et des cris d’oiseaux qui ne quittent pas les souvenirs du poète :

« Quand l’ouragan dans la nuit souffle dehors / C’est comme s’il traversait l’aire de son âme, / Avec ce bruit d’herbes froissées, de branches cassées, / Ces cris d’oiseaux arrachés du fond douillet de leurs nids, / Ces plaintes de vagabonds projetés hors de leurs abris, / Sur des chemins caillassés »

Et cet amour du pays natal resurgit dans « Les feux de la planète », cinquième recueil de Tati Loutard où une dizaine de textes rappellent la région natale du poète :

« Je sors d’un bras coupé de la mer / Et j’entends / Partout le bruit des vagues / Comme un appel maternel / (…) / J’ai plongé mille fois dans le sel qui virilise / Et d’avoir connu ma semence / Le flot est plus blanc d’écume / J’ai scellé mon cœur dans le calvaire d’un polypier »

On peut voir ici comment le poète se fait partie intégrante de la mer (l’océan) qui devient sa mère, sa maman. On ne peut le séparer du monde de l’océan qui lui rappelle aussi la vie de ses ancêtres.

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En conclusion on pourrait dire que Jean Baptiste Tati Loutard, en dehors de son attachement au Congo, dévoile dans sa poésie d’autres facettes de l’artiste. Son penchant pour ses confrères écrivains et artistes (il a été pendant plusieurs décennies président des écrivains et artistes congolais), son amour pour la vie, son dévolu, son regard d’homme sur la beauté de la femme que l’on doit aimer et chérir. Des thèmes de réflexion en puissance dans l’œuvre de ce grand poète congolais.


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